Par Monique Pagé
De petits bruits semblables à ceux que mes pas trainent comme des ombres sur le sentier asphalté! De petits bruits émanent d’une présence proche. Vous me suivez.
Je n’accélère pas. Il n’est pas question de dégager une impression de crainte ou même d’urgence. Le soleil vient à peine de quitter le zénith, vous et moi sommes immergés dans la lumière d’un beau début d’après-midi. Aucun danger.
Sans doute êtes-vous fasciné par l’oiseau chimérique que j’ai peint sur mon sac à dos. Peut-être voulez-vous simplement vous amuser en vous laissant guider par une flâneuse qui vous conduira où elle le choisira. On peut s’inventer un partenaire quand on est seul. Voilà, vous êtes seul dans ce quartier cosmopolite. Vous me parlerez dès que je m’arrêterai. Non, je déraille : tout simplement, par hasard vous avez le même rythme que moi, vous suivez le même courant d’air. Vous ne me voyez même pas puisque vous admirez la rivière et ses reflets pendant que moi je ne sens plus que la présence proche d’un impudent qui perturbe ma promenade. Je ne sais plus où je suis : ah oui, la rivière. Je suis venue ici pour le calme, la découverte, l’instant de grâce. Je n’ai encore rien perçu de tel !
Je m’arrête, m’appuie contre la rambarde. Et me retourne.
Je te vois enfin. Tel que tu es. Une outarde aux yeux de charbon. Un volatile en attente de ma pause-gouter. Que suis-je pour toi sinon une potentielle distributrice de victuailles?
Plus rien à craindre. Je t’avoue que j’étais légèrement inquiète. Les gens s’occupent si peu des autres quand une menace survient. Je suivais probablement le trajet que tu effectues tous les jours derrière un visiteur ou un autre.
Ton rythme me convient. Je te prends sous mon aile, camarade. Nous nous sommes dénichées l’une l’autre pour partager flânerie et quelques bouchées. Non, plus que ça, tu es cette découverte convoitée depuis des mois de solitude pandémique.
Ce texte a été écrit dans le cadre de l’atelier d’écriture géopoétique sur les parcs.
Votre commentaire